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Page:Anatole France - La Rôtisserie de la reine Pédauque.djvu/317

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M. d’Anquetil et roulèrent ensemble dans la poussière.

— Ces malheureux font mal à voir, soupira Jahel.

— Cette pitié, dit M. Coignard, vous sied comme une parure, mademoiselle ; ces soupirs ornent votre poitrine en la gonflant d’un souffle que chacun de nous voudrait respirer sur vos lèvres. Mais souffrez que je vous dise que cette tendresse, qui n’en est pas moins touchante pour être intéressée, trouble vos entrailles par la comparaison de ces misérables avec vous-même, et par l’idée instinctive que votre jeune corps touche, pour ainsi dire, à ces chairs hideusement ulcérées et mutilées, comme il est vrai qu’en effet il y est lié et attaché, en tant que membre de Notre-Seigneur Jésus-Christ. D’où il suit que vous ne pouvez envisager cette corruption sur la chair de ces malheureux sans la voir, dans le même temps, en présage sur votre propre chair. Et ces misérables se sont levés vers vous comme des prophètes, annonçant que la part de la famille d’Adam est, en ce monde, la maladie et la mort. C’est pourquoi vous avez soupiré, mademoiselle.

» Dans le fait, il n’y a aucune raison d’es-