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Page:Anatole France - M. Bergeret à Paris.djvu/135

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de la représentation, il alluma un cigare et se leva de table.

Joseph Lacrisse était discret par situation : il conspirait. Mais il aimait à faire montre de sa puissance et de son crédit. Il ôta de sa poche un portefeuille de maroquin bleu qu’il portait sur sa poitrine, contre son cœur ; il en tira une lettre qu’il tendit à madame de Bonmont, et dit en souriant :

— On peut faire des perquisitions dans mon appartement. Je porte tout sur moi.

Madame de Bonmont prit la lettre, la lut tout bas, et, rougissant d’émotion et de respect, la rendit, d’une main un peu tremblante, à Joseph Lacrisse. Et quand cette lettre auguste, rentrée dans son étui de maroquin bleu, eut repris sa place sur la poitrine du secrétaire de la Jeunesse royaliste, la baronne Élisabeth attacha sur cette poitrine un long regard mouillé de larmes et brûlé de flammes. Le jeune Lacrisse lui parut soudain resplendissant d’une beauté héroïque.