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Page:Anatole France - Thaïs.djvu/126

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véritable et divine charité. Je te promets mieux qu’ivresse fleurie et que songes d’une nuit brève. Je te promets de saintes agapes et des noces célestes. La félicité que je t’apporte ne finira jamais ; elle est inouïe ; elle est ineffable et telle que, si les heureux de ce monde en pouvaient seulement entrevoir une ombre, ils mourraient aussitôt d’étonnement.

Thaïs, riant d’un air mutin :

— Ami, dit-elle, montre-moi donc un si merveilleux amour. Hâte-toi ! de trop longs discours offenseraient ma beauté, ne perdons pas un moment. Je suis impatiente de connaître la félicité que tu m’annonces ; mais, à vrai dire, je crains de l’ignorer toujours et que tout ce que tu me promets ne s’évanouisse en paroles. Il est plus facile de promettre un grand bonheur que de le donner. Chacun a son talent. Je crois que le tien est de discourir. Tu parles d’un amour inconnu. Depuis si longtemps qu’on se donne des baisers, il serait bien extraordinaire qu’il restât encore des secrets d’amour. Sur ce sujet, les amants en savent plus que les mages.