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Page:Anatole France - Thaïs.djvu/243

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Paphnuce de leurs premières défiances. Paphnuce leur répondit :

— Sachez, mes frères, que la pénitence que j’endure est à peine égale aux tentations qui me sont envoyées et dont le nombre et la force m’étonnent. Un homme, à le voir du dehors, est petit, et, du haut du socle où Dieu m’a porté, je vois les êtres humains s’agiter comme des fourmis. Mais à le considérer en dedans, l’homme est immense : il est grand comme le monde, car il le contient. Tout ce qui s’étend devant moi, ces monastères, ces hôtelleries, ces barques sur le fleuve, ces villages, et ce que je découvre au loin de champs, de canaux, de sables et de montagnes, tout cela n’est rien au regard de ce qui est en moi. Je porte dans mon cœur des villes innombrables et des déserts illimités. Et le mal, le mal et la mort, étendus sur cette immensité, la couvrent comme la nuit couvre la terre. Je suis à moi seul un univers de pensées mauvaises.

Il parlait ainsi parce que le désir de la femme était en lui.

Le septième mois, il vint d’Alexandrie, de Bubaste et de Saïs des femmes, qui longtemps