Aller au contenu

Page:Anatole France - Thaïs.djvu/268

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

d’esprit que le vieux serpent, son adversaire. Celui-là est un merveilleux artiste. Je ne suis si belle que parce qu’il a travaillé à ma parure. C’est lui qui m’a enseigné à natter mes cheveux et à me faire des doigts de rose et des ongles d’agate. Tu l’as trop méconnu. Quand tu es venu te loger dans ce tombeau, tu as chassé du pied les serpents qui y habitaient, sans t’inquiéter de savoir s’ils étaient de sa famille, et tu as écrasé leurs œufs. Je crains, mon pauvre ami, que tu ne te sois mis une méchante affaire sur les bras. On t’avait pourtant averti qu’il était musicien et amoureux. Qu’as-tu fait ? Te voilà brouillé avec la science et la beauté ; tu es tout à fait misérable, et Iaveh ne vient point à ton secours. Il n’est pas probable qu’il vienne. Étant aussi grand que tout, il ne peut pas bouger, faute d’espace, et si, par impossible, il faisait le moindre mouvement, toute la création serait bousculée. Mon bel ermite, donne-moi un baiser.

Paphnuce n’ignorait pas les prodiges opérés par les arts magiques. Il songeait dans sa grande inquiétude :

— Peut-être le mort enseveli à mes pieds