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Page:Anatole France - Thaïs.djvu/279

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ton image, puisque Flavien, les moines et le peuple ont été témoins de ton ravissement.

Cependant Paphnuce résolut d’aller recevoir la bénédiction d’Antoine.

— Frère Zozime, dit-il, donne-moi une de ces palmes et allons au-devant de notre père.

— Allons ! répliqua Zozime ; l’ordre militaire convient aux moines qui sont les soldats par excellence. Toi et moi, étant abbés, nous marcherons devant. Et ceux-ci nous suivront en chantant des psaumes.

Ils se mirent en marche et Paphnuce disait :

— Dieu est l’unité, car il est la vérité qui est une. Le monde est divers parce qu’il est l’erreur. Il faut se détourner de tous les spectacles de la nature, même des plus innocents en apparence. Leur diversité qui les rend agréables est le signe qu’ils sont mauvais. C’est pourquoi je ne puis voir un bouquet de papyrus sur les eaux dormantes sans que mon âme se voile de mélancolie. Tout ce que perçoivent les sens est détestable. Le moindre grain de sable apporte un danger. Chaque chose nous tente. La femme n’est que le composé de toutes les tentations éparses dans l’air léger, sur la terre fleurie,