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Page:Anatole France - Thaïs.djvu/283

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noircis et desséchés d’informes lambeaux, d’autres n’avaient pour vêtements que des roseaux liés en botte avec des viornes. Plusieurs étaient nus, mais Dieu les avait couverts d’un poil épais comme la toison des brebis. Ils tenaient tous à la main une palme verte ; l’on eût dit un arc-en-ciel d’émeraude et ils étaient comparables aux chœurs des élus, aux murailles vivantes de la cité de Dieu.

Il régnait dans l’assemblée un ordre si parfait que Paphnuce trouva sans peine les moines de son obéissance. Il se plaça près d’eux, après avoir pris soin de cacher son visage sous sa cucule, pour demeurer inconnu et ne point troubler leur pieuse attente. Tout à coup s’éleva une immense clameur :

— Le saint ! criait-on de toutes parts. Le saint ! voilà le grand saint ! voilà celui contre lequel l’enfer n’a point prévalu, le bien-aimé de Dieu ! Notre père Antoine !

Puis un grand silence se fit et tous les fronts se prosternèrent dans le sable.

Du faîte d’une colline, dans l’immensité déserte, Antoine s’avançait soutenu par ses disciplines bien-aimés, Macaire et Amathas. Il