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Page:Anatole France - Thaïs.djvu/71

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ne point m’abandonner aux fureurs de l’amour et pour me confirmer dans la doctrine du divin Épicure, mon maître, qui enseigne que le désir est redoutable. Mais à proprement parler, l’amour est une maladie de foie et l’on n’est jamais sûr de ne pas tomber malade.

Paphnuce demanda :

— Dorion, quels sont tes plaisirs ?

Dorion répondit tristement :

— Je n’ai qu’un seul plaisir et je conviens qu’il n’est pas vif ; c’est la méditation. Avec un mauvais estomac il n’en faut pas chercher d’autres.

Prenant avantage de ces dernières paroles, Paphnuce entreprit d’initier l’épicurien aux joies spirituelles que procure la contemplation de Dieu. Il commença :

— Entends la vérité, Dorion, et reçois la lumière.

Comme il s’écriait de la sorte, il vit de toutes parts des têtes et des bras tournés vers lui, qui lui ordonnaient de se taire. Un grand silence s’était fait dans le théâtre et bientôt éclatèrent les sons d’une musique héroïque.

Les jeux commençaient. On voyait des sol-