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Page:Anatole Leroy-Beaulieu - Empire des Tsars, tome 3, Hachette, 1889.djvu/522

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riennes ou mennonites. Les doctrines, comme le nom de la stunda, viennent de ces colons allemands. C’est là un phénomène écent, car, d’ordinaire, ces Allemands se tenaient à l’écart de leurs voisins russes et avaient peu d’influence sur le moujik. Parmi ces colons, pour la plupart d’origine souabe, les hommes pieux ont l’habitude de se réunir pour lire en commun la Bible. Ces réunions portent dans leur nouvelle patrie, comme dans l’ancienne, le nom de Stunden (heures)[1], d’où le sobriquet de stundistes donné aux Russes qui les ont fréquentées ou imitées. Un pasteur du village de Rohrbach eut, vers 1860, l’idée d’inviter des paysans petits-russiens à ces Stunden, non pour les convertir, ce qui est interdit par la loi, mais pour les moraliser. Alors même qu’il admettait des Russes dans la confrérie des amis de Dieu (Gottesfreunde), ce pasteur avait soin de les engager à ne pas abandonner l’Église orthodoxe. Ses conseils ne furent pas suivis. Les visiteurs des Stunden se pénétrèrent des maximes protestantes et se détachèrent entièrement de l’Église. Le berceau du stundisme semble en effet le village de Raslopol, limitrophe de la colonie de Rohrbach. Le paysan Michel Ratouchny, qu’on a regardé comme le fondateur de la stunda russe, adopta l’enseignement des anabaptistes ou mennonites, exigeant de ses prosélytes adultes un second baptême. Un autre paysan, Gérasime Balabane, nie au contraire la nécessité du second baptême et repousse des rites conservés par les baptistes russes. Les sectateurs de Balabane, qui paraissent les plus nombreux, s’intitulent « Confrérie évangélique ».

Baptistes ou non, la théologie de ces nouveaux évangéliques ne semble pas toujours fort arrêtée. Comme mainte secte russe, ils paraissent avoir sur le dogme des idées moins nettes que sur le culte et la morale. En paysans, avant tout préoccupés de la vie pratique, c’est par la réforme du culte et des observances qu’ils ont commencé,

  1. Comparez le mot Heures en français. On a aussi voulu faire dériver le nom de stundistes d’un livre de piété intitulé Stunden der Andacht.