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Page:Anglas de Praviel - Scènes d’un naufrage ou La Méduse.djvu/113

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malgré toutes les invitations qui leur avaient été faites, lors de son son abandon, on ne trouva que trois infortunés à la veille d’expirer.

Douze des plus décidés, se voyant à la veille de manquer de tout, avaient construit un radeau avec les différentes pièces de la frégate. Les restes de ce radeau ayant été trouvés par les Maures sur la côte du désert, nous supposons que ces malheureux, après avoir été en proie à toutes les souffrances auxquelles avaient été exposés ceux du premier radeau, s’éteignirent d’inanition ou devinrent la proie des monstres marins.

Un matelot voulut aussi gagner la terre en se plaçant sur une cage à poule à une encâblure de la frégate, il fut submergé et disparut pour toujours.

Quatre s’étaient déterminés à ne pas abandonner la frégate, un de ceux-ci venait de mourir de besoin quand la goélette arriva. Ses camarades lui avaient donné la mer pour sépulture. Deux jours plus tard on n’aurait trouvé que des cadavres.

Les trois autres restant avaient pris pour domicile, l’un le grand mat, l’autre le mat d’artimon, le troisième le mal de misaine qu’ils ne quittaient que pour aller chercher des vivres, ne consistant qu’en lard salé, en suif et un peu d’eau-de-vie.

Le besoin ayant fini par faire naître chez eux une certaine méfiance, quand ils se rencontraient en allant à la recherche des vivres, ils se menaçaient de coups de couteau.