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Page:Anicet, Ponson du Terrail, Blum - Rocambole-IA.djvu/106

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MADAME FIPPART.

Mon Dieu, envoyez-lui le repentir et la résignation !

ROCAMBOLE, se relevant.

Mourir !… quand on est jeune, quand on est riche ?… Non, je ne veux pas mourir !… Mourir ici, et lui laisser le triomphe, la fortune, l’impunité ?… mourir et ne pas me venger ?.. pas un témoignage qui l’accusé… pas une preuve qui le condamne ?… Oh ! non ! non !… Dieu qui me frappe ne peut pas l’absoudre, lui qui m’a fait assassin et infâme !

MADAME FIPPART.

On viendra ! on soulèvera cette pierre !…

ROCAMBOLE.

Mais trop tard… trop tard !… il n’y aura plus ici qu’un cadavre…

MADAME FIPPART.

Ah ! mon Dieu !

ROCAMBOLE.

Eh bien, ce cadavre peut encore le dénoncer… Oui… oui… Mais comment écrire ?… Ah ! cette carte, ce valet de cœur.. il y a lui même écrit son nom de Gordon… Un poignard.. (Il le tire de sa poche.) Mon sang… (Il se pique la veine du poignet.) Oui, voilà Ce qu’il me faut… (Un genou en terre, il écrit fiévreusement sur l’autre.) « Le docteur Gordon, sir William, César Andréa, chef des valets de cœur, ne sont qu’un même homme. Andréa était mon complice, et il m’a tué !… Joseph Fippart. »

MADAME FIPPART.

Mon Dieu, que ma mort soit l’expiation de sa vie !

ROCAMBOLE.

Pauvre mère ! elle prie pour moi, elle ne pense qu’à moi… et je ne tenterais rien… rien pour elle ?… Ah ! je lui dois jusqu’à mon dernier souffle… Inspirez moi, Seigneur, pour elle… pour elle… Ah ! cette barre de balancier… avec ce fer, j’ouvrirai une brèche dans ce mur à demi-ruiné déjà… Oui, oui… (Embrassant sa mère.) Mère… mère… tu ne mourras pas… je ne veux pas que tu meures, nous sortirons d’ici… (Il gravit le tas de pierres détachées du mur à gauche.)

MADAME FIPPART

Seigneur ! avez-vous donc pitié de nous ?

ROCAMBOLE, frappant la muraille.

Oh ! nous reverrons la clarté du ciel… Mon Dieu, je ne vous demande plus pour moi ni liberté ni vengeance…