Aller au contenu

Page:Anicet, Ponson du Terrail, Blum - Rocambole-IA.djvu/48

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

ARMAND.

Baccarat !

BACCARAT.

Allons ! allons ! c’est fini. Vous n’aurez pas de scène d’Hermione ce soir… Non ! je suis si heureuse de te revoir ! Qu’as-tu donc ? Ta main est brûlante… et je te trouve bien pâle, mon ami… Tu travailles trop.

ARMAND.

J’avais un tableau à livrer à Durand-Ruel.

BACCARAT.

Encore un chef-d’œuvre… Oui, monsieur, un chef-d’œuvre qu’on vous aura mal payé, comme toujours. Je veux que vous ne vendiez plus vos tableaux qu’à moi.

ARMAND.

Vous savez, ma chère, que je ne puis rien vous vendre.

BACCARAT.

Oui, j’oublie qu’avec toi seul je n’ai pas le droit d’être riche. Oh ! tiens, cette fortune, c’est elle qui nous sépare. Si je maudis parfois les scrupules.. oh ! je les respecte, va ! mon cœur peut encore comprendre toutes les délicatesses du tien… Ô mon Armand ! si je t’avais connu plus tôt !… Vois-tu ce passé, cet abominable passé, je voudrais pouvoir l’effacer au prix de tout ce que je possède. Ô mon Armand ! si tu m’aimais comme je l’aime, nous pourrions être heureux encore, oui, bien heureux. Dis un mot, et il n’y aura plus entre nous un souvenir, une trace du passé… je vendrai tout ce que j’ai… oui, tout ce qui ne me vient pas de toi… et cette fortune, car c’est une fortune, je la donnerai tout entière aux pauvres ! Armand, comme la prière, comme le repentir… la charité purifie ! Alors, je redeviendrai ce que j’étais, une bonne ouvrière ; nous irons loin, bien loin, pour que pas un écho de Paris ne puisse arriver jusqu’à toi… Alors, plus rien… rien que le travail et l’amour !

ARMAND.

Pauvre Baccarat !

BACCARAT.

Pourquoi pleures-tu en m’écoutant ?

ARMAND.

Oh ! tu m’aimes bien, toi, et je viens…

WILLIAM, entrant.

Pardon ! c’est moi… Je vous annonce qu’il y a émeute au salon, et j’ai promis de vous ramener.