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Page:Apollinaire - Le Poète assassiné, 1916.djvu/157

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LE POÈTE ASSASSINÉ

meaux d’oliviers. Les palmes étaient soit simples, soit tressées selon un art spécial. À chaque coin de rue, des tresseurs de palmes travaillaient assis contre une muraille. Sous leurs doigts experts les fibres des palmes se courbaient, s’enroulaient bizarrement et gracieusement. Des enfants jouaient déjà aux œufs durs. Sur une place, une troupe de gamins rossait un gosse roux que l’on avait surpris se servant d’un œuf de marbre. C’est de cette façon qu’il cassait les œufs et les gagnait. De toutes petites filles allaient à la messe, bien vêtues et portant, comme des cierges, les palmes tressées auxquelles leurs mères avaient suspendu des friandises.

François des Ygrées pensa :

« La vue des palmes porte bonheur et aujourd’hui Pâques fleuries, je veux faire sauter la banque. »

Dans la salle des jeux, il regarda d’abord la foule disparate qui se pressait autour des tables…

François des Ygrées s’approcha d’une table et joua. Il perdit. Le Mammon invisible était revenu et parlait durement chaque fois qu’on ratissait les mises :

« Tu as perdu ! »