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Page:Apollinaire - Le Poète assassiné, 1916.djvu/309

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GIOVANNI MORONI

« Mais il me calma en disant :

« — Giovannino, sois sage. Ce soir nous serons à Turin et je te mènerai voir Giandouia, qui ressemble en plus grand à ton pantin préféré.

« Je regardai Maldino avec tendresse, et, à l’idée que j’allais le voir en plus grand, je me consolai.

« La nuit, nous arrivâmes à Turin. Nous couchâmes à l’auberge. Je tombais de fatigue, mais tandis que mon père me déshabillait, je demandai :

« — Et Giandouia ?…

« — Ce sera pour demain soir, dit mon père, tandis qu’il bordait mon lit, ce soir il est aussi fatigué que toi.

« Pour la première fois, je m’endormis sans avoir dit ma prière du soir.

« Le lendemain, mon père me mena voir Giandouia. Je n’avais encore jamais été au théâtre. Je fus aux anges pendant toute la représentation et ne perdis aucun des gestes des nombreuses marionnettes de grandeur naturelle qui s’agitaient sur la scène ; mais je ne compris rien à l’intrigue de la pièce qui, autant que je me souvienne, devait en partie se passer en Orient. Lorsque tout fut fini, je ne pouvais pas le croire. Mon père me dit :

« — Les marionnettes ne reviendront plus.