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Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu/308

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si loin, il n’avait pas songé à faire entrer des troupes dans la ville ; îl comprit la faute qu’il avait faite ; il envoya ordre au régiment de Flandre qui se trouvait dans la vallée de Barcelonette de venir à Aix ; la compagnie des grenadiers, qui avait marché sans séjour, arriva le lendemain de l’arrêt.

La surprise des jansénistes fut d’autant plus grande qu’ils ne s’y attendaient point ; elle augmenta bien davantage, quand ils apprirent qu’on avait arrêté quatre des principaux négocians de Marseille, qui avaient été mis dans la citadelle. La Cadière prit le parti de choisir une retraite où elle fût ignorée. Ce fut alors le temps des proscriptions ; les molinistes ne furent pas plus réservés que les jansénistes l’avaient été ; on arrêtait tous les jours un nombre infini de personnes ; les lettres de cachet arrivaient en foule, et une terreur panique avait saisi tous les cœurs[1].

Pendant que ma patrie était en proie à la dissention je vivais assez tranquille avec Chichote ; elle était jolie et d’une humeur

  1. C’est au système d’ambition hypocrite de la dernière femme de Louis XIV, la marquise de Maintenon, qu’est dû l’ascendant qu’a long-temps eu en France la bêtise du molinisme et du jansénisme. Cette adroite