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Page:Argens - Mémoires du marquis d’Argens.djvu/413

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pour elles ; ce qui lui fut également arrivé, s’il n’en eût eu qu’une et qu’il l’eût assez aimée pour passer la complaisance jusqu’à cet excès horrible. Considère combien notre coutume est plus utile à la société que celle des chrétiens. Lorsqu’une femme chez toi se trouve stérile, son mari devient inutile à l’état ; il est puni lui-même, sans l’avoir mérité, des défauts de son épouse, et privé pour jamais du doux nom de père. De là viennent les mauvais ménages et la débauche outrée dans laquelle se plongent ceux de ta religion, et que tu reproches à tort aux musulmans, à qui la loi divine, que leur a donnée leur grand prophète, permet par une sage maxime la pluralité des femmes, que la nature semble nous conseiller.

Tu te récries mal à propos sur les plaisirs de notre paradis ; les railleries que tu en fais ne décident rien, à moins que tu ne veuilles exiger que des plaisanteries servent de raisons. Je veux te convaincre, poursuivit Osman, par tes propres préjugés. Tu penses qu’un jour tu reprendras ton même corps et que tu seras dans le paradis comme tu es actuellement dans le monde : or si tu crois donc que l’odorat la vue le goût le toucher, seront rendus