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Page:Aristote - Poétique et Rhétorique, trad. Ruelle.djvu/198

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LA RHÉTORIQUE

feste. C’est ainsi que les Athéniens, revendiquant Salamine[1], invoquaient le témoignage d’Homère[2] ; et naguère les Ténédiens, celui de Périandre, le Corinthien[3], contre les habitants de Sigée. Cléophon se servit contre Critias des vers élégiaques de Solon, lorsqu’il déclara que sa maison était impure, car, autrement, Solon n’eut jamais écrit ce vers :

Va dire, de ma part, au blond Critias d’obéir à son père[4].

C’est pour les faits accomplis antérieurement que l’on invoque des témoins de cette sorte.

XIV. Pour les faits à venir, ce sont aussi les auteurs d’oracles. Ainsi Thémistocle dit que les murailles de bois signifient qu’il faut combattre sur mer[5]. Les proverbes sont encore comme une espèce de témoignage[6]. Par exemple, si l’on veut conseiller de ne pas se faire un ami de tel vieillard, on prend à témoin le proverbe : « Ne fais pas de bien à un vieillard. » Pour conseiller de supprimer les fils, après avoir supprimé les pères, ou citera cette autre maxime :

Insensé celui qui, meurtrier du père, laissera vivre les enfants[7].

  1. Contre les Mégariens.
  2. Hom., Il., II, 557. Diogène Laërce (I, 48) et Plutarque (Solon p. 83) disent que ce vers d’Homère fut ajouté par Solon. Quintilien (Inst. orat., V, 11, 40), en le rappelant, ajoute qu’il ne se rencontrait pas dans toutes les éditions de l’Iliade.
  3. Un des sept sages auteur d’un poème intitulé : Ὑποθῆκαι (préceptes). On ne connaît pas le passage auquel Aristote fait allusion.
  4. Critias, un des trente tyrans, fils de Dropidas, frère de Solon. Proclus (in Timæum, l. I, p. 25) rapporte le distique entier avec une variante préférable au texte d Aristote (Lallier, Revue historique, sept.-oct. 1877).
  5. Cp. Hérodote, VII, 141.
  6. Nous supprimons εἴρηται, qui ne fait pas de sens. Cp. Spengel, Notes.
  7. Vers de Stasinus. Cp. Clem. Alex., Strom., VI, p. 451, Sylb.