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Page:Arnould - Histoire populaire et parlementaire de la Commune de Paris, v3.djvu/63

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— Parfaitement, citoyenne. N’avez-vous pas lu le décret de la Commune ?

— Si, mais je craignais d’avoir mal compris.

— Avez-vous le moyen de payer ces termes ?

— Comment l’aurais-je ? Voilà huit mois que je suis sans ouvrage. Nous avons vécu, depuis ce temps, avec la solde de mon mari, garde dans tel bataillon (2,25 par jour pour les hommes mariés). Il a fallu, avec cela, nourrir trois enfants. Tout ce qui pouvait s’engager est au mont-de-piété.

(Quelquefois la pauvre femme était veuve, son mari ayant été tué aux avant-postes. D’autres fois, il était simplement prisonnier ou blessé, ce qui revenait au même).

— Quel est votre propriétaire ?

— C’est un tel !

(Ici apparaissait, le plus souvent, le nom de quelque riche banquier, ou négociant, ou entrepreneur, bien connu dans le quartier pour sa grande fortune).

— Eh bien, citoyenne, vous n’avez qu’à déménager quand vous le voudrez.

— Et on ne me gardera rien ?

— Rien !

— Je pourrai emporter mes meubles, mon linge, mes vêtements, ceux de mes enfants, ma machine à coudre, etc. ?

— Vous pourrez emporter tout. — Mais le propriétaire s’y opposera. Il est impitoyable. L’année dernière, il a fait saisir une pauvre femme dont le mari était à l’hospice depuis plusieurs mois.

— L’année dernière, il a fait ce qu’il a voulu. La loi était pour lui. Aujourd’hui la loi est pour la justice. La propriété du pauvre est aussi sacrée que celle du riche. Chacun doit supporter sa part