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Page:Arnould - Histoire populaire et parlementaire de la Commune de Paris, v3.djvu/75

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anonymes dont l’histoire ne gardera pas les noms.

Je vis des femmes qui essuyaient une larme furtive, non pas du peuple, celles-là ne pleuraient pas, mais de jeunes femmes en riche toilette, car, à ce moment, Paris presque tout entier ressentait une immense et profonde indignation contre l’attaque sacrilège des Versaillais. Au fur et à mesure que nous avancions vers les quartiers populaires, des cris de colère, des serments de vengeance, s’échappaient de la foule.

Je me rappelle encore la figure d’une vieille femme du peuple, rue de la Roquette. Son visage labouré de rides, était sévère. Toute sa physionomie respirait l’énergie. Son regard inquiet semblait chercher quelque chose. Tout à coup il s’arrêta. Elle venait d’apercevoir les écharpes rouges de la Commune. Sa figure changea d’expression. L’espoir et l’enthousiasme l’illuminèrent, et je l’entendis murmurer, comme je passais auprès d’elle :

— Les voilà !

Pendant que son regard presque attendri se reposait sur nous, avec quelque chose de maternel, On eut dit quelle retrouvait des fils depuis longtemps perdus, depuis longtemps attendus, et qu’elle ne croyait plus revoir.

Je ressentis à ce moment ce que j’avais déjà ressenti lors de la proclamation de la Commune : — le sentiment d’une effrayante responsabilité.

Cette femme nous croyait évidemment, dans sa foi naïve et ignorante, le pouvoir de sauver la Révolution, et qui lui eût prédit le prochain avenir eût été mal venu d’elle.

Pauvre femme !

Dans tout ce long parcours, il se trouva un individu qui ne se découvrit pas. Un des gardes