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Page:Audibert Histoire et roman 1834.djvu/265

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comme un long sillon de feu qui marque la route qu’elle a parcourue, elle laisse la pensée gravée sur l’airain. Et moi, moi… Tenez, quittons ce sujet, il me rend trop cruelle l’idée de la mort.

— Ne dirait-on pas que la mort est là tout près ? n’avez-vous pas un long avenir devant vous ?

— La mort ! elle est toujours là. Croiriez-vous qu’en sortant de chez moi, souvent je reviens sur mes pas pour mettre quelqu’ordre dans mes papiers, comme si je ne devais plus rentrer ? Et même sur la scène, combien de fois n’ai-je pas été assailli par de sinistres pressentimens, par de funèbres images ! En jouant Cinna il m’est arrivé, il n’y a pas très-long-temps, d’entrevoir tout autour de moi des abîmes sans fond. Je n’osais plus ni reculer ni avancer ; si cela eût duré, j’aurais demandé pitié au public. « Pour arracher des pleurs, il faut que vous pleuriez », a dit Boileau. Je puis dire à mon tour : « Pour vous faire frémir, je commence par fré-