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Page:Audibert Histoire et roman 1834.djvu/435

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J’étais sous la puissance d’un charme indéfinissable qui me suivit, dans mon sommeil. On m’avait placé dans un de ces appartemens longs et solennels, aux panneaux de chêne noir, aux larges poutres, aux sombres vitraux ; une chambre comme celle de ma mère quand je n’étais qu’un jeune enfant ; mais mon sommeil fut moins un repos que la continuation de ma journée. Toujours des mots de gloire, toujours des louanges, toujours de l’enthousiasme. Cependant, au plus fort de mon agitation, la Provence ne s’éloignait pas de ma vue, de cette vue de l’âme qui dure encore alors que nos sens ne sont plus éveillés. C’était bien la Provence, son ciel, son air, ses flots, son parfum. Seulement le jour était plus pur. On ignorait, chose étrange, d’où il venait ; point de soleil, quoiqu’il n’y eût point de nuages pour le cacher. Au lieu de recevoir la lumière, les objets semblaient la donner ; ils s’éclairaient eux-mêmes. Les arbres se balançaient, l’onde courait, l’air soufflait mollement, et le ciel semblait laisser tomber sur la terre une rosée de volupté.