Page:Augagneur, Erreurs et brutalités coloniales, Éditions Montaigne, 1927.djvu/162

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forme circulaire, où se dressaient les édifices publics : maisons du chef de poste et de ses officiers, palais de justice, prison, casernes, etc. La ville formait une étoile. De la grande place centrale partaient des rues, chacune consacrée à un corps de métier : bouchers, bijoutiers, tailleurs, agriculteurs, etc… La ville fut peuplée par ordre, une discipline paternelle et prévoyante y régna.

Chaque matin réveil en fanfare, départ en corps pour les champs de culture, éloignés de plusieurs kilomètres. Retour avant la nuit, en corps toujours : devant le cortège des cultivateurs, une fanfare de clairons et de fifres. Retour joyeux par ordre. Tout le monde prenait son repas du soir à la même heure. À 8 heures rassemblement sur la grande place : bal et danses par ordre. À 9 heures, retraite, extinction des feux à 9 h. 30 et sommeil, toujours par ordre.

Ces indigènes ont bien mauvais caractère ! Ils ne goûtaient point du tout cette succession de travaux, de plaisirs réglementés ; ils désertaient Salente et fuyaient vers leur brousse. Trois ans plus tard, je passai dans cette cité modèle : elle était entièrement déserte et tombait en ruines. Idoménée avait eu un successeur moins autoritaire ; les indigènes étaient retournés à leurs habitations anciennes.

Ces contraintes agissaient sur l’esprit des indigènes, les poussaient à résister aux prescriptions de l’autorité française, à détester cette autorité comme une tyrannie. D’autres raisons sont venues les aggraver, transformer en insurrection violente et armée une opposition jusque-là latente et passive. Ces causes immédiates de la révolte, extrinsèques comme les nommait l’administration