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Page:Augagneur, Erreurs et brutalités coloniales, Éditions Montaigne, 1927.djvu/185

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Les villages prennent la fuite pour échapper aux corvées, à l’impôt, au désarmement. Des reconnaissances commandées par un gradé indigène, ou constituées par des partisans, sont lancées à leur poursuite. Les instructions données à ces reconnaissances sont résumées ainsi dans une lettre d’un chef : « Donner la chasse aux bourjanes, brûler les abris, détruire les plantations ». La chasse consiste à tirer, sur les indigènes en fuite et sans armes, des feux de salve. Ainsi lancées les reconnaissances font feu sur tout être rencontré. Elles deviennent si dangereuses, qu’en mars 1904 le capitaine Quinque prescrit aux chefs de reconnaissance dans l’Ivolobe de ne pas faire tirer trop vite, « car ils pourraient atteindre des émissaires, qui ont d’ailleurs reçu l’ordre de venir auprès des tirailleurs ou des Européens qu’ils rencontreraient et qui sont prévenus que s’ils prennent la fuite, ils seront poursuivis à coups de fusil ».

Les reconnaissances tirent sur les femmes, les enfants, comme sur les hommes. Les gens de Bekifafo fuient devant une reconnaissance, ils perdent en route un homme et une femme tués, une femme blessée par les tirailleurs.

Une reconnaissance, commandée par le lieutenant Janiaud, découvre un village dissident, habité par trois hommes et trois femmes. Ils fuient à son approche. Un homme et une femme sont tués, cette dernière par mégarde, dit le rapport, le tirailleur Mahatsanga « l’ayant prise pour un homme ».

Une autre reconnaissance aperçoit, devant une grotte, un indigène qui se prépare à fuir : elle tire et le tue, le supposant porteur d’un fusil : il n’avait qu’une angady et deux sagaies.