Aller au contenu

Page:Augagneur, Erreurs et brutalités coloniales, Éditions Montaigne, 1927.djvu/31

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

gène entrait dans la rivière près de lui, mais puisait, pour boire, un peu d’eau dans le creux de sa main.

Epuisé par la marche, par une nuit sans sommeil, par cinq ou six heures passées dans l’eau, par la perte de son sang, par la douleur de sa blessure, par quarante-huit heures d’inanition, Janiaud se sentait épié, se savait à onze heures de marche de Befotaka, à seize heures de Midongy, postes les plus voisins, voyait à quelques centaines de mètres le cadavre de Baguet, son camarade.

À la nuit les sentinelles disparurent. Janiaud sortit de sa retraite humide et lentement s’éloigna sur le chemin. Il passa près du cadavre de Baguet, les pieds et les mains coupés, tout lacéré de coups de sagaies. Cinquante pas plus loin, c’est le corps du tirailleur Rainizanabelo, dépouillé de ses vêtements.

À 2 heures du matin, Janiaud arrivait au village d’Ambolaboka. Les habitants lui donnèrent à manger du miel, des œufs, des bananes, confectionnèrent un brancard de fortune. Quatre hommes le portèrent au village d’Ambatomainty, où il retrouvait les porteurs du convoi de Baguet, ceux qui avaient traversé l’Isandra. Les porteurs l’amenèrent à Midongy où il parvint au matin.

Cette expédition manquée avait coûté la vie au lieutenant Baguet et à trois tirailleurs. Rainivaza, le pied gauche brisé, avait été achevé à coups de hâche ; Rainizanaka, atteint d’une balle au ventre, fut tué à coups de sagaies ; Andiamalazovola, blessé au jarret, fut achevé à coups de hache. Le partisan Isola avait été tué par une balle.