Aller au contenu

Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome V.djvu/229

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

résolue la question posée précédemment, à l’occasion de ces paroles : « S’il n’était pas un malfaiteur, nous ne te l’aurions pas livré ; » car on voulait en conclure que dans l’Évangile de saint Jean, les Juifs ne formulaient aucun crime contre le Sauveur. Saint Jean continue : « Pilate ayant entendu ces discours, fit sortir Jésus et s’assit sur son tribunal, dans le lieu appelé Lithostrotos, en hébreu Gabbata. Or, on était à la veille de Pâque, vers la sixième heure ; et Pilate dit aux Juifs : Voici votre Roi. Ils s’écrièrent : Enlève, enlève-le, crucifie-le. Pilate leur dit : Crucifierai-je votre roi ? Les prêtres répondirent : Nous n’avons pas d’autre roi que César. Alors Pilate le leur livra pour le crucifier. » Voilà, d’après saint Jean, ce qui se passa au tribunal de Pilate[1].

CHAPITRE IX. JÉSUS JOUET DE LA SOLDATESQUE.

36. Il nous reste à parcourir les témoignages des quatre évangélistes, relatifs à la passion même du Sauveur. Saint Matthieu commence ainsi : « Alors les soldats du gouverneur ayant emmené Jésus dans le prétoire, rassemblèrent autour de lui toute la cohorte, et après lui avoir ôté ses vêtements, ils le couvrirent d’un manteau d’écarlate. Et entrelaçant une couronne d’épines, ils la lui mirent sur la tête, avec un roseau dans la main droite, et fléchissant le genou devant lui, ils le raillaient en disant : Salut, Roi des Juifs[2]. » Saint Marc raconte ainsi le même fait et au même endroit de sa narration : « Les soldats le conduisirent dans la cour intérieure du prétoire ; là ils convoquent toute la cohorte ; puis ils le revêtent de pourpre, lui mettent sur la tête une couronne d’épines, tressée par eux, et se mettent à le saluer : Salut, roi des Juifs ; et ils lui frappaient la tête avec un roseau, et ils le couvraient de mépris, et ployant le genou ils l’adoraient[3]. » Ce que saint Matthieu appelle un manteau d’écarlate, saint Marc l’appelle un vêtement de pourpre. À la place de la pourpre royale, on se servit par dérision de ce vêtement d’écarlate ; la pourpre a en effet le rouge de l’écarlate. Il peut se faire aussi que saint Marc ait entendu désigner la pourpre, attachée au manteau d’écarlate. Saint Luc n’a pas parlé de cette circonstance. Saint Jean, avant de rapporter la sentence de Pilate livrant le Sauveur au supplice de la croix, raconte le même fait en ces termes : « Pilate se saisit donc de Jésus et le fit flageller. Les soldats, après avoir fait une couronne d’épines, la lui mirent sur la tête, le couvrirent d’un manteau de pourpre et s’approchaient de lui en disant : Salut, roi des Juifs, et ils le souffletaient[4]. » Il suit delà que saint Matthieu et saint Marc racontent cet événement sous forme de récapitulation, et non pour marquer qu’il eut lieu après la sentence de crucifiement, portée par Pilate. Aussi saint Jean annonce clairement que ce fut chez Pilate que le Sauveur subit cette honteuse humiliation, et les autres évangélistes ne font que rappeler ce qui s’était fait. On doit aussi rapporter à cela ce qu’ajoute saint Matthieu : « Et le couvrant de crachats, ils prirent un roseau et lui en frappaient la tête ; et après qu’ils l’eurent tourné en dérision, ils le dépouillèrent de son manteau, le couvrirent de ses propres vêtements et le conduisirent au lieu où il devait être crucifié. » Ce dépouillement du manteau que devaient remplacer ses vêtements, n’eut lieu qu’à la fin de cette scène, quand on allait le conduire au supplice. Saint Marc rapporte le même fait en ces termes : « Et après qu’ils l’eurent tourné en dérision, ils le dépouillèrent de la pourpre et le couvrirent de ses vêtements. »

CHAPITRE X. JÉSUS AIDÉ À PORTER SA CROIX.

37. Nous lisons en saint Matthieu : « Pendant qu’ils le conduisaient, ils rencontrèrent un homme de Cyrène, nommé Simon, et le mirent en réquisition pour porter la croix de Jésus[5]. » En saint Marc : « Et ils le conduisent, pour le crucifier. Et voyant passer un certain Simon de Cyrène, venant de sa villa, et père d’Alexandre et de Rufus, ils le mirent en réquisition pour porter la croix de Jésus[6]. » En saint Luc : « Pendant qu’ils le conduisaient, ils se saisirent d’un certain Simon de Cyrène, qui revenait de sa villa et le chargèrent de la croix pour la porter après Jésus[7]. » Voici le récit de saint Jean : « Ils prirent donc Jésus et l’emmenèrent ; ainsi chargé de sa croix il se dirigea vers le lieu du Calvaire, en hébreu Golgotha ; c’est là qu’ils le crucifièrent[8]. » Ces paroles

  1. Jn. 18, 28 ; 19, 16
  2. Mat. 27, 27-31
  3. Mrc. 15, 16-20
  4. Jn. 19, 1-3
  5. Mat. 27, 32
  6. Mrc. 15, 20-21
  7. Luc. 23, 26
  8. Jn. 19, 16-18