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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome V.djvu/258

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dans un autre ordre, dans d’autres occasions ; et non à propos de celui qui n’était pas à la suite du Sauveur et chassait les démons en son nom. Quant à moi, je crois, sur l’autorité de saint Marc, que Jésus-Christ a réellement répété ici des vérités déjà exprimées ailleurs ; car elles s’appropriaient parfaitement à la défense adressée à ses disciples d’empêcher de faire des prodiges en son nom, quand on ne comptait pas parmi eux. Voici en effet l’enchaînement de ces paroles : « Qui n’est pas contre vous, est pour vous ; car quiconque vous donnera un verre d’eau en mon nom, parce que vous appartenez au Christ, je vous le dis r en vérité, il ne perdra pas sa récompense. On doit tirer cette conclusion, déjà suggérée par saint Jean, que celui qui a fourni le sujet de cet entretien n’était pas tellement éloigné de la société des disciples, qu’il l’eût réprouvée comme l’aurait fait un hérétique ; il ressemblait à ces hommes qui n’osent recevoir les sacrements de Jésus-Christ et sont cependant remplis de respect pour le nom chrétien ; qui reçoivent les chrétiens, et leur rendent des services précisément parce qu’ils sont chrétiens ; et de qui le Sauveur a dit qu’ils ne perdent pas leur récompense. Non pas qu’ils doivent se croire en parfaite sûreté à cause de la bienveillance dont ils entourent les chrétiens, tout en refusant de se purifier dans le baptême de Jésus-Christ et de s’incorporer à (unité de son Église ; seulement la miséricorde de Dieu les gouverne, elle les amène à ces moyens de salut et ils sortiront en paix de ce monde. Avant même de faire partie de la société chrétienne, ces hommes sont plus utiles que ceux qui, déjà baptisés et initiés aux sacrements chrétiens, prodiguent les mauvais conseils jusqu’à entraîner avec eux dans les flammes éternelles, ceux à qui ils persuadent le mal. Sous la figure des membres corporels, de la main à couper ou de l’œil à arracher, Jésus-Christ les désigne comme devant être retranchés de la société chrétienne, afin que l’on entre dans la vie après s’être séparés d’eux plutôt que d’être précipités avec eux en enfer. Or, pour se séparer d’eux, il suffit, comme il est nécessaire, de n’écouter pas et de ne pas suivre leurs conseils scandalisateurs. De plus, si le scandale dont ils sont le principe est connu de toute la société chrétienne, ils doivent en être impitoyablement retranchés, et privés de toute participation aux sacrements. Si le scandale n’est connu que d’un petit nombre, et que la majorité ignore leur perversité, on doit les tolérer, comme avant de vanner le grain on tolère la paille dans faire ; pourvu toutefois qu’on ne participe point à leur iniquité en y consentant et qu’à cause d’eux on ne se sépare point de la société des bons. Telle est la conduite que tiennent ceux qui ont le sel en eux-mêmes et qui conservent la paix entre eux.

CHAPITRE VII. NUL DÉSACCORD DANS SAINT MARC.

8. Saint Marc continue : « Jésus étant parti de ce lieu vint sur les confins de la Judée, au-delà du Jourdain ; le peuple s’assembla encore autour de lui, et il se mit de nouveau à les instruire selon sa coutume, A etc, jusqu’à ces mots. « Car tous n’ont fait que donner de leur abondance ; tandis que cette femme a pris sur sa pauvreté et donné toute sa subsistance[1]. » Tout ce récita déjà été examiné quand nous l’avons rapproché de celui de saint Matthieu, et nous avons reconnu qu’il était en parfait accord avec celui de tous les autres évangélistes. Quant à l’histoire de cette pauvre veuve, qui jette dans le trésor du temple ses deux petites pièces de monnaie, elle ne nous est rapportée que par saint Marc et saint Luc[2], et sans aucune apparence de contradiction. Depuis ce passage jusqu’à celui où est racontée la cène du Seigneur, et à partir duquel nous avons examiné successivement tous les textes, on peut comparer l’Évangile de saint Marc à n’importe quel autre, on y trouvera l’harmonie la plus parfaite.

CHAPITRE VIII. L’ÉVANGILE DE SAINT LUC ET LES ACTES.

9. Occupons-nous maintenant de l’Évangile de saint Luc, du moins quant aux passages qui ne lui sont pas communs avec saint Matthieu et saint Marc ; car les autres ont déjà été étudiés précédemment. Saint Luc commence ainsi son récit : « Plusieurs ont déjà entrepris d’écrire l’histoire des événements qui ont été accomplis parmi nous, suivant le rapport que nous r en ont fait ceux qui, dès le commencement, « les ont vus de leurs propres yeux, et qui ont été les ministres de la parole. J’ai donc cru à mon tour, très-excellent Théophile, qu’après avoir été exactement informé de toutes ces choses depuis le commencement, je devais

  1. Mrc. 10, 1 ; 12, 44
  2. Luc. 11, 1-4