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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome V.djvu/367

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genre ; soit les lois de la nature, par exemple, par la contumélie, le meurtre, l’homicide, les abominations et les bestialités ; soit la mesure dans les choses permises, comme quand on accable l’orgueilleux plus qu’il ne faut quand on mange ou qu’on boit au-delà du nécessaire, quand on use du légitime mariage au-delà de ce qui est permis, et choses semblables.
2. Confiance que devait inspirer le don des langues. – On comprend bien qu’en accordant aux hommes le don des langues, qui ont été établies par le bon plaisir et l’entente réciproque des hommes, et qui s’apprennent, grâce aux sens extérieurs, par l’habitude d’entendre, le Saint-Esprit ait eu le dessein de leur apprendre combien il lui est facile de les rendre sages, en répandant dans leurs cœurs la, sagesse qui vient de Dieu.
3. Comment tout est dans le Verbe. — La volonté du Verbe éternel est toujours immuable, parce qu’elle possède en même temps toutes choses : mais la nôtre n’a point de stabilité, précisément parce qu’elle n’est pas dans les mêmes conditions ; c’est pourquoi nous voulons tantôt une chose, tantôt une autre. Tout ce qui a été fait pour l’homme a été connu par lui à l’avance, de la même manière qu’un peintre a dans l’idée de reproduire sur la toile tout un palais, et prévoit ou tonnait le lieu où il doit le peindre : ainsi le Verbe a tout en idée, en préparation, en volonté, quoiqu’il exécute chaque chose en son temps et à des époques déterminées. C’est ainsi que toute créature, et l’humanité même, en qui devait se personnifier la Sagesse d’une manière mystique et ineffable, était de tout temps, comme par un art éternel de Dieu, dans cette même sagesse, quoiqu’elle fasse chaque chose en son temps, atteignant avec force depuis une extrémité jusqu’à l’autre, disposant tout avec douceur, et renouvelant toutes choses, en demeurant immuable en elle-même[1].
4. La mort et le progrès dans la vertu. — À propos de la manière dont on désirerait vouloir mourir, si un homme, doué d’une foi intègre et qui voit où il doit en venir, parvenait à vouloir mourir comme il le souhaite, il aurait déjà fait du progrès, pour être prêt à quitter cette vie sans répugnance. Car autre chose est de voir où il faut en venir, autre chose d’aimer ce terme de l’existence et de désirer l’atteindre : celui qui éprouve ce désir dans son cœur doit nécessairement mourir sans regret. C’est donc en vain que plusieurs, qui sont animés d’une foi véritable, disent qu’ils ne veulent pas mourir, afin de faire des progrès ; puisque leur progrès consiste précisément à vouloir mourir. Par conséquent, s’ils veulent être sincères, qu’ils ne disent pas : Je ne veux pas mourir, afin de l’aire des progrès ; mais : Si je ne veux pas mourir, c’est parce que je n’ai pas fait de progrès. Ne pas vouloir mourir, n’est donc pas un conseil de perfection pour des fidèles, mais c’est l’indice qu’ils n’ont point fait de progrès. Ce qu’ils ne veulent pas.dansle dessein d’être parfaits, qu’ils le veuillent donc, et la perfection leur est assurée.
Traduit par M. l’abbé POGNON.

  1. Sag. 8, 1 ; 7, 27