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Page:Augustin - Œuvres complètes, éd. Raulx, tome XII.djvu/280

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DE LA DIVINATION DES DÉMONS.


ils étaient irrépréhensibles, par la raison qu’ils plaisaient au Dieu souverainement juste, avouez que maintenant ils seraient coupables, puisque Dieu, ordonnant ou permettant qu’on les abolisse, c’est une preuve qu’ils lui déplaisent.

CHAPITRE II.
DIEU A PERMIS, COMME TOUT-PUISSANT, CE QU’IL DÉSAPPROUVAIT COMME INFINIMENT JUSTE. — LIVRES PONTIFICAUX QUI RÉGLAIENT LES CÉRÉMONIES PROFANES. — RÉSUMÉ ET ÉNONCÉ.

4. On me répliquait que de nos jours ces actes sont injustes, mais non point mauvais cependant ; injustes, puisqu’ils attaquent une loi qui les proscrit ; non point mauvais toutefois, puisque s’ils étaient un mal, ils n’auraient jamais dû plaire à Dieu ; et que s’ils lui avaient toujours déplu, jamais ils n’auraient existé, car ils n’auraient pas été tolérés par Celui qui peut tout, par Celui qui ne méprisera jamais des faits pareils, assez importants et assez graves pour attaquer la religion même et le culte de Dieu, s’ils sont coupables.

Eh bien ! dis-je alors, si vous n’y voyez aucun mal sous prétexte que le Tout-Puissant, en laissant faire, montre assez qu’il approuve, comment sera-t-il permis et bon de les interdire et de les abolir ? Car, s’il n’est pas bien d’abolir ce qui plaît à Dieu, sa toute-puissance ne devrait pas permettre cette abolition. En détruisant ainsi ce qui plaît à Dieu, les hommes, en effet, attentent au culte qui honore le vrai Dieu. Or, si sa toute-puissance laisse s’accomplir cette abolition supposée coupable, vous ne devez donc pas justifier les faits eux-mêmes, sous le prétexte que le Tout-Puissant les permet.

5. On me dit alors qu’il fallait bien accorder que ces faits sont maintenant coupables. On alla plus loin ; ils ont cessé de se produire, me dit-on, parce qu’ils déplaisent maintenant au Tout-Puissant ; mais ils lui ont agréé à l’époque où ils se produisaient. Nous ne savons pas pourquoi ils lui étaient alors agréables, et pourquoi ils lui déplaisent aujourd’hui ; mais une chose est certaine du moins : c’est que jadis ils n’auraient point eu lieu, s’ils n’avaient point agréé au Tout-Puissant, et qu’ils n’auraient point fini de nos jours, s’ils n’avaient point cessé de plaire à sa toute-puissance.

Pourquoi donc, répliquai-je aussitôt, pourquoi des actes semblables s’opèrent-ils en secret, de nos jours mêmes, tantôt cachés à tout jamais, tantôt surpris et châtiés, — s’il est vrai que le Tout-Puissant ne permette aucun acte de ce genre qui ne plaise à sa souveraine justice ? Car une chose injuste ne peut jamais plaire à Celui qui est juste par excellence.

On me répondit en niant absolument l’existence d’actes semblables à notre époque. Les rites décrits dans les livres Pontificaux ne s’accomplissent plus aujourd’hui, me dit-on ; alors, au contraire, ils avaient lieu légitimement ; alors ils plaisaient évidemment à Dieu, par cela seul que, tout-puissant et juste, il laissait tout faire. Que si maintenant quelques-uns de ces sacrifices défendus se font clandestinement et contrairement aux lois, ils ne peuvent être comparés avec ces rites Pontificaux des cérémonies sacrées ; bien plus, il faut les ranger parmi les rites nocturnes ; et toutes ces opérations illicites sont proscrites et condamnées par les livres Pontificaux eux-mêmes. Ma réponse fut : Pourquoi Dieu permet-il même ces faits irréguliers, s’il est vrai qu’il ne méprise aucun des actes attentatoires à la religion ? Ces faits eux-mêmes doivent inquiéter le ciel ; c’est un aveu que sont forcés de faire ceux-là surtout qui estiment les livres Pontificaux jusqu’au point de regarder comme défendu de Dieu ce que ces livres défendent. À quel titre, dès lors, Dieu les défend-il, sinon comme lui étant désagréables ? Et sa défense ne montre-t-elle pas non-seulement qu’il les désapprouve, mais encore qu’il en a souci, loin de les couvrir d’un mépris absolu ? Concluez plutôt que certains faits sont condamnés par sa justice, bien que permis par sa toute-puissance.

6. Après ces explications, on m’accorda qu’il ne fallait pas juger une œuvre, en général, comme juste et bonne, par la seule raison que le Tout-Puissant la laissait passer, bien qu’elle lui déplaise. On convint même d’avouer que les œuvres détestables qui attaquent directement le culte de Dieu, se trouvent tout ensemble et désapprouvées par la Souveraine Justice et permises par la Toute-Puissance en considération du jugement à venir. On demanda dès lors à traiter un point nouveau ; à savoir d’où viennent les divinations