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Page:Augustin Crampon - Les quatre Evangiles, Tolra et Haton, 1864.djvu/563

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d’elles qu’un même fils, Zorobabel, a deux pères : en saint Matthieu, Jéchonias ; en saint Luc, Néri ; et les deux branches remontent par deux tiges entièrement séparées jusqu’à David, comme de Zorobabel elles descendent, en deux lignes tout à fait distinctes, jusqu’à Joseph qui, lui aussi, a deux pères. Comment expliquer cela ? — Par la loi même des Juifs. Il existait chez les Juifs une coutume sanctionnée par la loi de Moise, qui voulait que, si un homme mourait sans laisser d’enfant, son plus proche parent épousât sa veuve pour lui susciter une postérité, et l’enfant qui naissait du mariage, fils naturel du second mari, était fils légal du premier. C’est la loi du Lévirat, telle qu’on la voit réglée dans le Deutéronome (xxv, 5-10), et mise en pratique dans l’histoire de Ruth (iv, 7). Des deux pères donnés à Joseph, et avant lui à Salathiel, l’un est le père naturel, l’autre le père légal ; et les deux évangélistes, selon qu’ils ont pris l’un ou l’autre, ont été amenés à donner deux séries différentes : de Joseph, par Jacob ou par Héli, à Zorobabel, fils de Salathiel ; et de Salathiel, par Jéchonias ou par Néri, à David. — Pour écarter une explication si simple, le docteur Strauss suppose qua le mari donné à la veuve par la loi du lévirat est le frère ou le très-proche parent du premier, de telle sorte que les deux généalogies, l’une légale, l’autre naturelle, reviennent presque aussitôt à la même tige. D’abord, cette hypothèse est toute gratuite : la loi demande le plus proche parent, mais le plus proche peut ou bien se trouver lui-même assez éloigné, ou bien refuser, et laisser passer ce droit ou ce devoir à une ligne fort reculée. Le P. Patrizzi, répondant aussi à l’objection de Strauss, invoque d’autres raisons qui montrent que la différence entre les deux généalogies est moins grande qu’elle ns le paraît au premier coup d’œil : la multiplicité des noms propres pour un seul personnage chez les Hébreux, l’omission volontaire de plusieurs noms dans saint Matthieu, les inexactitudes des copistes, etc. Ainsi, par exemple, le Joanna de saint Luc, père de Juda, pourrait bien être le même personnage qua l’Abiud de saint Matthieu ; car Abiud en chaldéen signifie père de Juda. Sadoc veut dire juste ; le personnage ainsi appelé de son surnom par saint Matthieu ne serait-il pas le même qu’un autre appelé par saint Luc de son nom véritable ? De même entre Naggé, écrit dans d’autres manuscrits Nancé, Maggé, Aggé, n’est peut-être que l’Achim de saint Matthieu.

Il ns s’agit plus que de savoir (mais cela ne touche pas à la véracité des deux auteurs) lequel a suivi l’ordre légal, lequel l’ordre naturel, et pourquoi ils ne se sont pas accordés dans le même système. Sur ce dernier point, on pourrait dire qu’ils ne l’ont pas fait précisément pour donner la généalogie du Sauveur deux aspects différents. La parenté légale est celle qu’on observait dans les actes publics ; mais il importait de montrer que Jésus-Christ était naturellement, et non pas seulement par une fiction légale, du sang de David ; et c’est sans doute ce que saint Matthieu a voulu expressément marquer par le mot engendra. Saint Luc se sert d’un terme plus vague et plus général.

Grand-Conseil : voy. Sanhédrin.

Hérode (Famille d’). Famille d’origine iduméenne qui, depuis la conquête de la Judée par Alexandre Jannée, était entrée en fré-