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Page:Avenel - Histoire de la presse française, 1900.djvu/70

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HISTOIRE DE LA PRESSE FRANÇAISE

renvoi de Necker, et qui poussa les Parisiens jusque sous les canons de la Bastille.

A l’allégresse, à la vivacité des transports, que manifeste Camille Desmoulins, dans sa première brochure, la France libre, nous pouvons juger l’état d’esprit de ses contemporains, au milieu de l’année 1789.

« Altérés d’une soif de douze siècles, s’écrie-t-il, nous nous sommes précipités vers la source dès qu’elle nous a été montrée. Il y a peu d’années, je cherchais partout des âmes républicaines ; je me désespérais de n’être pas né Grec ou Romain… Mais c’est à présent que les étrangers vont regretter de n’être pas Français. Nous surpasserons ces Anglais si fiers de leur Constitution, et qui insultaient à notre esclavage. Plus de magistrature pour de l’argent, plus de noblesse transmissible, plus de privilèges pécuniaires, plus de privilèges héréditaires, plus de lettres de cachet, plus de décrets, plus d’interdits arbitraires, plus de procédure criminelle secrète. Liberté de commerce, liberté de conscience, liberté d’écrire, liberté de parler. Plus de ministres oppresseurs, plus de ministres déprédateurs, plus d’intendants vice-despotes, plus de jugements par commissaires. plus de Richelieu, plus de Terrai, plus de Laubardemont, plus de Catherine de Médicis, plus d’Isabelle de Bavière, plus de Charles IX, plus de Louis XL Plus de ces boutiques de places et d’honneurs chez la Dubarry, chez la Polignac. Toutes les cavernes de voleurs seront détruites, celle du rapporteur et du procureur, celles des agioteurs et celles des monopoleurs, celles des huissiers-priseurs et celles des huissiers-souffleurs. L’extinction de ces parlements qui ont tant enregistré, tant décrété, tant lacéré, et se sont nosseigneurisés ; qu’il en périsse jusqu’au nom et à la mémoire… La même loi pour tout le monde. Que tous les livres de jurisprudence féodale, de jurisprudence fiscale, de jurisprudence des dîmes, de jurisprudence « les chasses, fassent le feu de la Saint-Jean prochaine ! Ce sera vraiment un feu de joie et le plus beau qu’on ait jamais donné au peuple… La Bastille sera rasée, et sur son emplacement s’élèvera le temple de la liberté, le palais de l’Assemblée nationale… Oui, tout ce bien va s’opérer ; oui, celle révolution fortunée, cette régénération va s’accomplir ; nulle puissance sur la terre en état de l’empêcher. Sublime effet de la philosophie, de la liberté et du patriotisme ! »

Chose à peine croyable, le Parlement de Toulouse, à la veille de disparaître avec les autres cours souveraines, condamna au feu la