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Page:Bérard - Un mensonge de la science allemande, 1917.djvu/232

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regardé comme votre ouvrage et sera proprement votre mérite, étant la première source. »

Villoison, qui attachait le plus grand prix à ce témoignage de Heyne, avait encarté cette lettre dans l’exemplaire spécial, qu’il s’était fait tirer de son Iliade[1]. En son français maladroit, mais touchant, Heyne portait sur la découverte de Villoison le jugement qu’un siècle de travail critique a confirmé : sans l’Iliade de Venise, ni Wolf ni les philologues du xixe siècle n’auraient pu entreprendre cette « critique profonde » dont nous recueillons aujourd’hui les fruits. Villoison n’a pas été l’auteur de la révolution homérique ; mais il en a été, comme disait Heyne, la première source ; dès l’apparition de l’Iliade et des Prolégomènes de Wolf, dès la première ligne de son compte rendu dans les Göttingische Anzeigen du 21 novembre 1795, Heyne avait proclamé ce qu’il répétait quatre ans plus tard en cette lettre à Villoison : « Voici donc les premiers fruits du zèle sans pareil de ce grand serviteur de la littérature qui s’appelle d’Ansse de Villoison ; j’ai souvent regretté qu’il ait dû ne faire que les premiers travaux pour les autres et qu’il ne lui ait pas été accordé de faire lui-même la récolte… Il avait [du moins] réuni dans ses Prolégomènes tant de matériaux pour la critique du texte qu’il n’y fallait plus qu’une mise en œuvre[2]. »

Wolf n’a jamais reconnu sa dette envers Villoison. Non seulement il a caché ses emprunts ; mais il s’est efforcé de les nier et, s’il n’a pas osé traiter Villoison comme il avait traité d’Aubignac, il a repris envers lui les procédés dont il avait pensé se couvrir contre les droits de Merian. À la page 11 de ses Prolégomènes, il a fait assurément un éloge de Villoison qui dure

  1. Publiée par A. Pierron, Iliade, II, p. 516 et suivantes.
  2. Göttingische Anzeigen, 1795, p. 1856-1857.