Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/73

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Tantôt, je l’eusse juré, elle les avait. Cela m’étonna. Après tout, cela ne nie regardait pas. Je repris mon livre, je lus quelques lignes. Quand même, pourquoi avait-elle enlevé ses bas ? La jambe se tendait vers moi, sans rien, étrangère comme une jambe dont on aperçoit la peau pour la première fois. Même en lisant, il m’en restait dans l’œil une tache rose. Et ce que je lisais m’intéressait si peu. Je regardai plus franchement. Bah ! qu’avait-elle de particulier, cette jambe ? Elle ressemblait à la mienne. D’une peau plus fine cependant, plus douce à voir, plus douce peut-être à… Qu’est-ce que je pensais là ? On ne pose pas un doigt sur la jambe de sa tante. Je fermai la main solidement pour emprisonner ce doigt. Je m’efforçai de lire. Pfff ! pfff ! le pied se retira, la jupe tomba, c’était fini.

— J’ai plus chaud que tantôt… As-tu lu, Marcel ?

— Oui.

Je mentais : je ravalai mon « Varia ». Elle m’embrassa. Sa joue mouilla la mienne. Une odeur monta, une odeur qui ne ressemblait à aucune autre, douce, écœurante un peu, que j’aurais voulu respirer tout le temps. Ici je ne me souciais plus des péchés. Pour l’odeur, je me dis : « C’est mal. » Malgré cela, j’aspirai un bon coup. Puis j’eus honte.