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Page:Baillon - Le Perce-oreille du Luxembourg, 1928.djvu/81

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qu’autrefois quand les petits garçons du parc étaient des Marcel, les petites filles des Jeanne.

Et l’oncle ? Je ne pensais pas avoir mal agi envers lui. Je l’aimais. Pourtant, certaines nuits, quand il entrait dans le lit de ma tante, cela pinçait. Lui mettait-elle la main sur la poitrine où bat le cœur ? Je me refusais d’y penser. Un jour, je les suivis dans le jardin. Un peu las, l’oncle marchait courbé à petits pas. Tante lui donnait le bras. Comme il semblait vieux ! Et près de lui, bien droite, comme Varia était jeune ! Je pensai à mon image : la reine au bras de son vieux roi, et moi tristement derrière eux, comme son page. Oui, c’était bien cela. Son page, porter sa traîne, ne rien dire, partout la suivre et un beau jour expirer car « leur amour était surhumain ». Je détestai mon oncle, ce jour-là.

Un soir, tante me surprit en train de farfouiller dans ma valise. Papa avait écrit : j’aurais à revenir bientôt. Moi qui pensais que cela durerait toujours !

— Que fais-tu là, petit.

— Rien.

— Tiens ! tiens ! un mouchoir à moi, un peigne à moi, un ruban : tu es un méchant petit voleur.

J’avais rassemblé avec dévotion ces souvenirs. Je me dressai très rouge :