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Page:Bakounine - Lettres à Herzen et Ogarev, trad. Stromberg, Perrin, 1896.djvu/381

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LETTRE DE BAKOUNINE À OGAREFF.


11 novembre 1874. Lugano.


Mon vieil, cher ami, te voilà bien loin de moi. Écris-moi, au moins, pour me tranquilliser, que les Herzen ne vont pas t’oublier dans ton éloignement, et te laisser sans ressources, livré à la souffrance et à une misère, si accablante dans la vieillesse, surtout quand on ne jouit pas de toute sa santé. C’est là ma première question. Ma deuxième est celle-ci : as-tu trouvé à Londres une société russe ou au moins, un seul Russe avec lequel tu pourrais échanger quelques paroles chaudes et sincères sur les affaires de Russie, qui sans aucun doute, t’intéressent comme par le passé au-dessus de toutes autres questions ? Il est vrai, que tu trouveras à Londres L… et son parti, mais lorsque tu les auras vus de plus près, à peine jugeras-tu opportun d’entretenir des relations intimes avec eux.

À propos, as-tu lu ma dernière brochure anonyme « L’Anarchie et l’État » ? Si tu ne l’as pas, écris-moi, je t’en enverrai un exemplaire.

Mais ce qui est essentiel, et je t’en prie encore une fois, dis-moi, comment tu vas ? Qui tu fréquentes, quelles sont tes connaissances ? En compagnie de qui passes-tu tes journées ? Je crains que la société anglaise ne présente qu’un intérêt médiocre à ton épouse (qui n’a pas reçu la bénédiction du pope), que je te prie bien de saluer de ma part ; je crains aussi que toi-même, tu n’éprouves à Londres le sentiment d’isolement si pénible à notre âge. La seule consolation qui nous reste, c’est la conscience de voir venir la mort pro-