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Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/331

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nez-moi, condamnez-moi, mais sachez-le ! Elle ne vous le dit pas, elle ! mais où elle est sublime, je serais infâme. Je ne veux pas courir l’horrible chance d’un mépris que je mériterais si je ne déchirais pas tous les voiles, si je ne versais pas tout mon cœur à vos pieds ! Je ne veux pas que vous puissiez mépriser le petit-fils que vous avez choisi, le Ryno à qui vous avez tendu la main et donné votre sang à pur don ! Votre estime m’est plus chère que votre vie, et Dieu sait pourtant si je donnerais volontiers la mienne pour vous ! Oh ! j’ai tremblé, je tremble encore que cette lettre ne soit une rude atteinte à votre vieillesse ! mais être trahie, mère, cela fait plus de mal que de mourir ! J’aimerais mieux vous avoir tuée que de vous avoir trahie, dussé-je en être inconsolable, dussé-je en mourir de désespoir, après vous ! Pardonnez-moi ces affreuses paroles qui m’échappent. Vous ne mourrez pas ! Vous êtes sous la sauvegarde d’un esprit immortel, qui domine en vous une sensibilité redoutable, il est vrai, mais que vous avez toujours gouvernée. Votre bonté vous soutiendra. Votre affection pour vos enfants vous inspirera du courage. Vous ne mourrez pas ; vous vivrez pour nous ! Nous avons besoin de vous, mère ! Il n’y a que vous qui puissiez ressusciter le bonheur que vous avez créé, il n’y a que vous qui puissiez replacer mes bras