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Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/41

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Madame de Marigny embrassa sa grand’mère, pendant que son mari baisait respectueusement la mitaine de madame d’Artelles.

— « Chère enfant, vous rentrez trop tard par ces grandes marées, — dit la marquise, en sentant la fraîche humidité qui pénétrait les cheveux et les vêtements de sa petite-fille. — Si vous vous rendez malade, vous me ferez mourir. Sonnez donc, Marigny, pour qu’on apporte du feu bien vite et qu’elle puisse sécher ses vêtements.

— Ah ! bonne maman, ne craignez rien, — dit-elle ; — ce n’est qu’un peu de vapeur et d’écume tombée sur ma robe pendant que nous passions, en barque, à la place du pont. Il est tout couvert ce soir, et l’on n’en aperçoit plus même la rampe. Je n’ai pas eu froid et je ne suis pas délicate. Je m’endurcis pour notre hiver si nous le passons à Carteret. Il faut bien que je m’accoutume à la vague et à la brise, puisque je suis la femme d’un amoureux de la mer ! »

On avait apporté du feu et des bougies pendant qu’elle parlait, et on put voir le regard de rivale heureuse, coquette et tranquille, qu’elle jeta, en disant ces paroles, sur cet amoureux de la mer, qui était le sien bien davantage !

Elle était debout à la cheminée, offrant à un