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Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/42

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feu de sarment qui pétillait, ses bottines grises, mouillées d’eau marine. Elle avait emporté dans sa promenade, contre les soudaines fraîcheurs du soir, une pelisse de satin bleuâtre, et après avoir ôté son chapeau, elle en avait ramené le capuchon sur son front. Empressée de revoir sa grand’mère, elle n’avait pas rabattu ce capuchon, et dans cette espèce d’auréole de satin bouffant, elle était, malgré son imposante beauté, aussi jolie que le Caprice. Les beaux serpents d’or de ses cheveux blonds dégouttaient de perles d’écume sur ses joues transparentes, un peu pâlies par le mariage, mais auxquelles la brise de la mer avait ramené, pour une heure, l’éclat de leur virginité. Les cils humides, les lèvres humides, les yeux humides, plus humides encore, à ce qu’il semblait, du sein de cette rosée des nuits et des mers qui la diaprait tout entière, elle était d’une beauté si délicatement étincelante qu’on eût pu trembler de la voir se sécher à cette flamme grossière de la terre et s’évanouir comme un arc-en-ciel.

— « Monsieur de Marigny, — dit la marquise, en la lui donnant, — on m’a remis pour vous une lettre venant de Paris. »

Marigny remercia, prit la lettre, en brisa le cachet et lut, à la clarté des bougies posées sur la cheminée. Dans l’admirable confiance