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Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/51

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bles tantôt fermes et tantôt mouvants. Là, chaque maison qui a sa vigne et son figuier a aussi son petit jardin d’une végétation un peu maigre, sous le souffle salé de la côte, mais dont la fraîcheur repose pourtant agréablement l’œil lassé de l’éclat des grèves. Les premières maisons de ce village — le manoir de madame de Flers en est une — sont presque toutes enceintes d’un mur de cour ou de jardin, avec un escalier extérieur et intérieur qui conduit sur le galet du rivage et dont la mer — dans ses grands pleins — gravit et bat les marches comme celle des escaliers de Venise. Au second plan de cette ligne d’habitations blanches et propres, la flèche de l’église s’élance du sein d’un bouquet d’arbres, qui rappellent la plantureuse Normandie au voyageur tenté peut-être de l’oublier. À soixante pas de ces maisons groupées harmonieusement sur ce coin de grève, un bras de mer, comme il en reste si souvent aux replis de ces plages, est traversé d’un pont construit grossièrement avec des planches et de grosses pierres, jetées dans l’eau, à la file les unes des autres. C’est la frontière de Carteret que ce pont, qui disparaît aux grandes marées sous le lent amoncellement des vagues, et que M. et madame de Marigny avaient trouvé couvert, en rentrant de leur promenade, un soir. Après ce pont, il y a en-