Aller au contenu

Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/72

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

visage irrégulier et olivâtre, paraît tout naturellement éclipsée.

« — Entrez, — me dit-elle assez gracieusement, en me montrant dans un sourire ses blanches dents que vous appelleriez des palettes, car elles sont un peu larges ; — entrez, monsieur de Prosny. On me coiffe, mais qu’importe ! Est-ce que les dames d’autrefois ne recevaient pas à leur toilette ? En faisant aujourd’hui comme elles, je vous rappellerai votre jeune temps »

« Je m’assis en la regardant, espérant assez peu, comtesse, trouver sur son visage les traces qu’avaient dû — je le supposais — y laisser les jours précédents. On ne lit guères dans sa physionomie, à moins qu’une émotion instantanée ne la saisisse. Ces sombres tempes gardent bien leur secret.

« Il s’agissait de la faire naître, cette émotion, et une fois déjà, j’avais éprouvé que c’était assez difficile. Après quelques menus propos de politesse et de conversation oiseuse :

« — Eh bien, — lui dis-je avec éclat. — voilà donc la chose faite ! Marigny est marié et je vous ai vue à son mariage. Vous avez eu là une drôle d’idée, señora, d’assister à une pareille cérémonie.

« — Porque no ?… — répondit-elle, en piquant une épingle d’or bruni à tête de topaze