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Page:Barbey d'Aurevilly - Une vieille maitresse, tome 2.djvu/91

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falaise, annonçait de l’eau pour le reste de la journée et rendait toute promenade impossible. Ils n’avaient pas quitté le salon. À une certaine heure, selon son usage, madame d’Artelles s’était retirée dans sa chambre et ils étaient restés seuls avec la marquise. Hermangarde brodait. Marigny, le bras passé derrière elle, sur le dos de son fauteuil, regardait le mouvement languissant de ces belles mains qui travaillaient. Ils avaient d’abord causé tous les trois. Puis la marquise avait paru s’assoupir. Elle s’était isolée d’eux par les cils baissés, mais non par la pensée. Discrétion délicate qui ménageait les plus sensitives pudeurs de sa fille, en ne voulant pas voir tomber quelque baiser, difficile à retenir, sur ce cou dont la ligne inclinée passait si près de la bouche de Ryno.

Après un temps qui ne leur parut guères, un domestique souleva la portière du salon. Un fermier demandait M. de Marigny. À ce moment, madame de Flers avait rouvert les yeux.

— « Ryno vous a-t-il réveillée, ma mère ? » — dit Hermangarde. Malgré les précautions qu’il avait prises, Marigny pouvait avoir fait quelque bruit, tout en traversant le salon.

— « Non, mon enfant, — répondit la marquise, — ton mari ne m’a point éveillée ; je ne dormais pas.

— Méchante bonne maman, — dit Herman-