Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/75

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vicomte, et tu t’en vas probablement… où tu passes tes journées. Tu fais bien : tu jouis de ton reste ! Si le Sombreval quitte le pays, et qu’à Coutances ils le mettent où il a mérité d’être, à quelque Trappe ou à quelque Couvent, pour faire pénitence et se refaire digne de dire la messe, tu n’iras plus probablement passer régulièrement tes après-dînées avec une fille de dix-huit ans, isolée, sans son père, au fond d’un château dont les murs ne sont pas de verre pour qu’on puisse mieux juger, à travers, de l’innocence de tes mœurs !

Néel pâlit, non du sarcasme de son père, mais de l’idée qu’il lui jetait et qui ne lui était pas venue au sein de sa nouvelle joie. Il comprit qu’il serait obligé de voir moins Calixte, par respect pour elle, pendant l’absence de Sombreval, et il monta à cheval avec l’anxiété horrible que lui inspirait cette idée : « la voir moins ! »

Il rencontra à la tête de l’étang, sur la route, les Herpin qui s’en allaient chercher une bannelée de tangue au quai du bourg de S…, et qui l’arrêtèrent pour lui dire, avec l’effarement satisfait de gens à nouvelles :

— Il y a donc du nouveau au Quesnay, monsieur Néel ? les lucarnes n’ont pas lampé c’te nuit… et les faces de crêpe ont détortillé leurs langues pour dire à Blandine que le