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Page:Barbey d’Aurevilly - Un prêtre marié, Lemerre, 1881, tome 2.djvu/74

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Coblentz, mais les Néhou n’ont pas l’habitude de reprendre ce qu’ils ont donné, et encore moins leur parole qu’autre chose… Moi, j’attends toujours que ta fantaisie pour ta petite garde-malade de là-bas soit passée… Seulement, en attendant, Bernardine flétrit dans les larmes la plus belle fraîcheur du Cotentin. C’est dommage, cela ! Jean Bellet, que j’ai envoyé leur porter une bourriche de sarcelles, tuées, à la canardière, par ma fenêtre, puisque ces diables de gouttes m’empêchent de sortir, Jean Bellet m’a dit qu’elle semble avoir les pâles couleurs.

Néel ne répondit pas. Depuis longtemps, Bernardine n’existait même plus dans sa pensée, et ce n’était pas au moment où Calixte lui semblait plus libre et plus près de lui, que mademoiselle de Lieusaint pouvait y reprendre le moindre empire. Blessé, comme toujours, par le ton de son père, il lui opposa, comme toujours, l’inertie d’un respectueux silence. Puis, après quelques secondes, il se leva pour prendre un fouet de chasse, posé en travers sur deux pattes-fiches de cuivre doré, au-dessous du portrait enfumé d’un de ses oncles, capitaine au régiment de Normandie, revenu bronzé de Saint-Domingue, et maigre comme une sauterelle, dans son uniforme blanc, à revers noirs.

— Tu ne me réponds pas, chevalier ? fit le