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Page:Barry - Chroniques du lundi, 1900.djvu/115

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Puisse sa bonne action lui attirer une récompense sur la terre, et puisse-t-elle lui valoir, dans l’autre côté, de ne pas aller se fumer lui-même dans le grand fourneau des éternelles représailles.

Je voudrais que vous eussiez vu la tête de la femme ! Cela faisait du bien de la regarder. Les grandes reconnaissances comme les grandes douleurs, je crois, sont muettes ; elle dit simplement : merci ! mais le regard qui accompagnait cette parole valait plus que toutes les plus sentimentales tirades.

Le mari s’est-il seulement douté au prix de quelles privations sa femme avait amassé les quelques sous qui devaient servir à lui acheter son cadeau du jour de l’an ? Je l’espère.

Bon, qu’est-ce que je vais vous souhaiter maintenant ?

« La paradis dans le ciel » comme on dit à la campagne ?

Oui, mais, en attendant, un peu de paradis sur la terre, sans pommier, sans serpent, en gardant tout le reste par exemple.

Les années se suivent mais ne se ressemblent pas.

« Le temps est un vrai brouillon, écrivait cette spirituelle Madame de Sévigné ; nous le trouvons toujours remuant, rangeant, dérangeant et rendant toutes choses bonnes ou mauvaises et presque toujours méconnaissables. »

C’est ainsi. S’il nous rend meilleurs, tant mieux, et pour nous rendre pires, il n’aura pas trop à faire. En cette période fin-de-siècle, il reste peu à inventer de ce côté-là.

Il ne faut pas être trop pessimiste non plus et espérer plutôt « que tout arrive pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles. »

Avec cela que tout va si vite dans le grand galop de la vie. Les morts, les naissances, les mariages, les larmes, les rires, se succèdent, s’entrecroisent, et, bien fin qui peut fixer quelque chose dans ce tourbillon général.

L’année 1893 apportera, elle aussi, sa part de tristesses et de sourires, et, c’est de tout mon cœur, que je désire que cette dernière soit pour tous la plus large.