Aller au contenu

Page:Barthe - Similia similibus ou la guerre au Canada, 1916.djvu/36

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
32
SIMILIA SIMILIBUS

— Monsieur Biebenheim, permettez-moi de vous présenter mon fiancé, M. Paul Belmont.

L’étranger réprima vite un léger mouvement de surprise et de dépit ; sans tendre la main, il salua gauchement, et tout ce qu’il put tirer de son larynx enroué de nature fut cette formule froidement polie, dite avec ce bizarre accent tudesque qui sonne si drôlement aux oreilles canadiennes :

— Che fous zouhaite peaucoup te ponheur !

Il ne s’attarda pas longtemps. Il était simplement venu en passant pour dire bonsoir. Ceux qui avaient assisté à cette petite scène se rappelaient qu’au moment de prendre congé il avait demandé à quand la noce, après quoi il avait murmuré cette phrase énigmatique :

— C’est dommache que fous ne m’ayez pas préfenu plus tôt, ch’aurais peut-être eu un pedit gonzeil à fous tonner…

— Donnez toujours, lui avait-on dit en riant.

— Non ! avait-il repris d’un ton de sphinx, en fusillant Paul de ses petits yeux gris. Maintenant il est trop tard. Trop tard !… Et il était parti dans la nuit.