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Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 3.djvu/132

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journal de ma vie.

blant tous deux d’ayder a destruire la gabionnade, et primes nostre temps pour nous jetter dans le trou de nostre barricade ou nous courusmes encor cette fortune qu’un soldat nous tira une mousquetade a bout portant, en y entrant, quy par miracle ne toucha ny Le Plessis ny moy. En mesme temps que je rentray, Porcheux et Campis revenoint de faire les deux charges susdites ou ils ne perdirent que deux soldats, et forces blessés, comme eux aussy.

J’avois veu la contenance des ennemis comme ayant esté parmy eux, ce quy me fit prendre cent hommes et en bailler cent autres au sergent de battaille Le Plessis quy prit dans le champ a gauche, et moy a droitte, et vinsmes en mesme temps par deux costés charger les demolisseurs de nostre gabionnade de telle sorte que nous les fismes jetter dans leurs cornes plus viste que le pas, et laisserent morts huit ou dix hommes des leurs, et quattre prisonniers. Le bruit courut au quartier du roy que j’avois esté pris et nos tranchées nestoyées par les ennemis. Le roy y envoya Fiesque[1] en diligence, auquel je fis voir plus de trente morts, et envoyay les prisonniers conter des nouvelles au roy.

Les ennemis quy n’estoint rentrés dans la ville et estoint demeurés dans les cornes nous vindrent taster sur le minuit, et a quattre heures du matin encores ; mais ils trouverent toujours a quy parler. Nous refismes la mesme nuit, non cette gabionnade, mais une forte barricade et bien flanquée, a sa place.

  1. Ugo de Fiesque, frère de celui dont il a été parlé au tome II, p. 145, servit en France dans les guerres contre les calvinistes, et depuis occupa de grands emplois dans sa patrie.