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Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 3.djvu/158

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journal de ma vie.

n’y eut pas la moindre rumeur ny allarme toute la nuit, bien que les soldats estrangers quy gardoint la ville fussent sur les bastions, le peuple dans les maisons, et quattre mille François et Suisses des gardes du roy dans les rues, carrefours, et places de la ville.

Le jeudy 20me nous fismes sortir tous les soldats estrangers et leur donnames escorte jusques a Montferrier[1], d’ou ils passerent aux Sevennes. Le roy en suitte y fit son entrée[2], et on cantonna les deux regimens des gardes aussy tost que le roy y fut entré. Tout y fut aussy paysible que sy jammais la guerre n’y eut esté.

Le samedy 22me Rouccelay mourut, et peu avant qu’il passat, il m’envoya prier de le venir voir. Il avoit le pourpre quy luy estoit sorty, quy estoit fort contagieux. Je fis ouvrir la porte de Montpelier comme sy je fusse allé au camp, et l’allay trouver. Il me confia sa cassette et ses papiers, me priant de faire brusler les lettres que je trouverois propres a cela, puis m’embrassa, et soudain mourut. Je me repentis fort d’y estre allé pour la contagion que j’en apprehendois ; mais enfin je n’en dis rien, et il n’en arriva aucun mal.

Le dimanche 23me il se fit procession generale par la ville, en laquelle on porta le Saint Sacrement.

Le lundy 24me, le mardy, et mercredy, fut employé a licentier les trouppes, tant de pié que de cheval ; oster a la reine mere et aux reine, Monsieur, et princes, les compagnies de chevaux legers quy estoint sous leur

  1. Au nord de Montpellier.
  2. Le roi, partant de Castelnau, fit son entrée par la porte de Lattes.