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Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 3.djvu/410

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journal de ma vie.

disgrace ; et de peur qu’il ne s’eschappat la troisieme, je le fis pendre le lendemain jeudy 5me, et fus rendre compte au roy de ce quy s’estoit passé la nuit, et que, du vent quy tiroit, les Anglois ne pouvoint venir a nous. Il tint conseil l’apres disner, et le soir monsieur son frere arriva avec trente gentilshommes qu’il me fallut coucher, loger et deffrayer.

Je fus la nuit battre l’estrade.

Le vendredy la mer fut agitée, et le vent demeura contraire aux Anglois quy furent toute la nuit battus de la tempeste.

Elle s’apaisa le samedy 7me : mais il pleut tout le jour, et le vent fut pour nous.

Monsieur disna et souppa toujours cheux moy.

Le dimanche 8me le vent fut de mesme, quy fit demeurer les Anglois a l’ancre.

Nous posames encores deux machines a la digue ou l’on travailloit incessamment. Launay Rasilly[1] mit aussy une estacade de mats de navires au courant de la digue.

Mr de chevreuse arriva, que je logeay.

Le lundy 9me je menay Monsieur a la digue le matin, lequel me pria de luy dire ce que le roy sentoit de son mariage avec la princesse Marie, et ce qu’il m'en disoit. Je luy dis qu’il ne m’en avoit jammais parlé. Il me repliqua : « Est il possible que, vous parlant incessamment comme il fait, il ne vous en die rien ? » Je

  1. Claude de Rasilly, seigneur de Launay, fils de François de Rasilly, et de Marie de Clermont-Toury, était commandant en l’île d’Oléron, et chef d’escadre. Il devint plus tard vice-amiral des armées navales de France.