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Page:Bassompierre - Journal de ma vie, 4.djvu/128

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1630. novembre.

accompagnay : ils s’enfermerent tous deux dans son cabinet, et le roy venoit la prier de superseder encores six semaines ou deux mois d’esclater contre monsieur le cardinal, pour le bien des affaires de l'estat quy estoint allors en leur crise, le roy ayant commandé a ses generaux de dela les monts de hasarder une battaille pour le secours de Casal[1] ; et la reine mere avoit resolu de dilayer encores ce temps là a la priere du roy son fils. Comme ils estoint sur ce discours monsieur le cardinal arriva, quy ayant trouvé la porte de l’antichambre a la chambre fermée, entra dans la gallerie et vint heurter a la porte du cabinet ou personne ne respondit ; en fin impatient et sçachant les estres de la mayson, il entra par la petite chappelle, la porte de laquelle n’ayant pas esté fermée, monsieur le cardinal y entra, dont le roy fut un peu estonné et dit a la reine : « Tout est perdu[2] ; le voycy », croyant bien qu’il esclatteroit : monsieur le cardinal quy s’apperceut de cet estonnement, leur dit : « Je m’asseure que vous parliés de moy. » La reine luy respondit : « Non faisions ; » sur quoy luy ayant repliqué : « Avoués le, Madame », elle luy dit que ouy, et là dessus se porta avec grande aygreur contre luy, luy desclarant qu’elle ne se vouloit plus servir de luy, et plusieurs autres choses ; sur quoy Mr Bouteillier arriva, et elle

  1. Cette bataille avait été empêchée le 26 octobre par Mazarin qui s’était jeté entre les combattants avec des paroles de paix : mais quelques troubles survinrent dans l’exécution des conventions, et les généraux furent obligés de renouveler le 27 novembre le traité qui stipulait l’évacuation du Montferrat par les Espagnols, et la retraite de l’armée française.
  2. Il y avait aux précédentes éditions : et dit à la reine, tout éperdu.