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Page:Baudoin - Jolis péchés des nymphes du Palais-Royal, 1882.djvu/83

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JOLIS PÉCHÉS DES NYMPHES

ma mère voulut bien consentir à ce que nous allions voir un très beau feu d’artifice qui devait se tirer sur le Pont-Royal : quelle joie !… quel bonheur ! je n’en fermais pas l’œil ; vingt-quatre heures d’avance j’avais déjà disposé ma belle toilette ; enfin, nous partons. J’avais les yeux ouverts sur tous les objets, comme une grande sotte : tout me semblait admirable ; j’étais dans un véritable ravissement. Nous arrivâmes aux Champs-Élysées ; les mâts de cocagne, les comestibles gratis, les danses, la foule, la cohue, tout attirait mon admiration ; je riais tout haut comme une imbécile, je battais des mains aux choses les plus simples, et quand quelque théâtre, quelque scène venait à m’enlever tout à fait, alors je trépignais, je serrais les mains de mes voisins, j’embrassais avec passion mon oncle, mon père, ma mère, notre servante, jusqu’à Félix, notre vieux domestique, qui portait nos provisions du dîner dans un grand panier à compartiments. Bientôt parvenus devant le théâtre des Funambules, quel fut mon nouveau ravissement, quand je vis deux belles dames, une marquise avec sa soubrette, raisonner sur l’amour en phrases bien articulées ; quand un sémillant cavalier leur baisa la main, etc. Ce monde tout nouveau pour mes sens toujours tenus dans les plus profondes ténèbres à cet égard, me confondait d’admiration ; mes questions à mon bon oncle ne finissaient pas. J’en