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Page:Belloy - Christophe Colomb et la decouverte du Nouveau Monde, 1889.djvu/162

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ingénieur et architecte, émerveillaient le jeune prince qui les suivait avec une intelligente curiosité. Déjà, adoptant en partie les usages européens, il portait habituellement une chemise, des gants, des chaussures, présents de l’Amiral en qui il semblait aimer et révérer un père. Comme il parlait souvent de ces Caraïbes anthropophages dont les incursions désolaient ses petits États, Colomb résolut avant de partir de lui laisser ainsi qu’à son peuple une haute idée des ressources qu’ils trouveraient dans une sincère alliance avec lui. Une sorte d’exercice à feu suffit pour leur inculquer cette opinion salutaire. Peu s’en fallut même que le but ne fût dépassé, tant le bruit et l’effet d’une arquebuse et d’un espingard déchargés contre la coque de la Sainte-Marie frappèrent tous ces pauvres gens de terreur.

Ces sages précautions prises, et la construction du fort étant terminée, Colomb consacra solennellement ce berceau d’une naissante colonie, en le mettant sous l’invocation de la naissance du Sauveur : il l’appela Natividad, comme nous aurions dit Noël, et il y fit arborer le drapeau de Castille. Il éleva en même temps sur un coteau voisin la croix la plus monumentale qu’eût encore vue le nouveau monde.

Les Indiens assistèrent à ces cérémonies, avec leur chef revêtu d’un superbe manteau écarlate, et entouré de nobles et de prêtres, déployant une pompe dont l’Amiral se montre à la fois émerveillé et édifié. Son cœur nageait dans la joie devant la respectueuse attitude, et les fréquents signes de croix de ces sauvages qu’il voyait, dans le plus prochain avenir, convertis à une religion dont ils pratiquaient déjà la morale.